Le Kintsugi commence à être connu. Ce n’est pas un proche parent de Clint Eastwood, comme un ami se croyant drôle me le soufflait, mais un procédé nippon pour réparer des objets cassés de manière à les rendre opérants, vertu principale de toute réparation, et plus beaux.
Un procédé traditionnel ou séculaire, comme souvent indiqué. En fait, il date du XVème siècle. Oui, comme vous, je me suis dit que tout était relatif… L’histoire raconte que le shogun (et néanmoins samouraï. A noter que l’homme fut un homme de pouvoir qui développa les arts, comme vous le lirez dans le lien qui suit.) Ashikaga Yoshimasa, basé à Kyoto, avait un bol préféré pour la cérémonie du thé (le bol est appelé Chawan en Japonais, et la cérémonie du thé s’appelle Chanoyu). Il est à noter que ces bols provenaient de Chine, autre pays amateur de thé. La cérémonie du thé japonaise consiste à préparer et à consommer le thé, souvent à partir de thé vert en poudre, le fameux matcha tant à la mode aujourd’hui.
Pour préparer le thé, il faut utiliser un Chasen, fouet fabriqué en bambou. L’artisanat japonais excelle dans la fabrication traditionnelle de ce genre d’objets. J’apprécie tout particulièrement les vidéos relatant les processus artisanaux de fabrication d’objets, comme la fabrication de soba, udon, ramen ou de couteaux par de grands maîtres.
Les plus curieux d’entre vous auront cliqué sur le lien soba ou couteaux plus haut. Ils auront pu admirer comment l’un des maîtres soba parmi les plus réputés du Japon procède. C’est un fascinant ballet d’une précision diabolique, requérant l’absolu maîtrise de celui qui a répété maintes fois son travail. Que ne donnerais-je pour en goûter la saveur !! Même chose pour le couteau. Prix d’un tel couteau de cuisine : de quelques centaines à quelques milliers d’euros.
Bref…
Un jour, notre Shogun Ashikaga Yoshimasa eut le malheur de casser son chawan préféré. Il le renvoya donc en Chine pour être réparé. Au retour, le bol était autant inutilisable que la réparation était laide. Il demanda à ses artisans de refaire une réparation pour que son chawan soit de nouveau utilisable et beau. Selon la légende, ce serait l’origine du Kintsugi. Profiter de la réparation pour rendre l’objet plus beau en soulignant la réparation avec de l’or, métal précieux par excellence, fut un coup de génie.
Le procédé est loin d’être simple et rapide. Il faut du temps à chaque étape, en particulier pour laisser sécher avant l’étape suivante. Pour en savoir plus, lire cet article détaillant les 6 étapes du Kintsugi. À l’exact antithèse de nos process industriels dont les principales qualité sont reproductibilité, vitesse de production et faible coût.

Au moment charnière de l’univers que nous vivons, où le gaspillage devient aussi criminel que l’achat d’objets utilisés une seule fois, ne devrions-nous pas nous en inspirer !
Par extension, Le Kintsugi devient l’art de la résilience. Nos blessures, nos souffrances, physiques ou morales, si elles ne nous tuent pas, façonnent un autre nous. La vie après les épreuves n’est plus la même qu’avant. Nous changeons nos points de vue, et c’est la plupart du temps pour nous améliorer, être plus empathiques, moins autocentrés.
Il existe une expression, sans doute vieille comme le monde, souvent attribuée à Léonard Cohen ou à Albert Camus, mais aussi à Djalâl ad-Dîn Rûmî, un philosophe, poète et mystique persan du XIIIème siècle qui dit : “Il y a une faille dans toute chose, c’est par là qu’entre la lumière.” (LC) ou “Ce que voit Faulkner, c’est que la souffrance est un trou. Et que la lumière vient de ce trou, oui.” (AC) ou encore “La blessure est le lieu par où la Lumière entre en vous.” (DaDR)
Un cancer a ouvert des fêlures en moi. Si j’en crois Leonard Cohen et les autres, de la lumière s’y glisserait. Je m’interroge. Pourtant je fais toujours écran entre le soleil et mon ombre. Enfin, si je me souviens bien, car en ce moment le soleil est rare au pied de ma colline. Je devrais monter sur le plateau pour vérifier cette histoire d’ombre. Ou profiter du soleil qui frappe l’autre rive de la Seine pour m’en aller promener cet après-midi, si la température quelque peu fraîche me fait la grâce de ne m’en point dissuader.
Faut-il prendre les poètes au pied de la lettre ? C’est le propre de la poésie d’imaginer que la lumière nous traverse alors que c’est juste que nous devenons un peu moins égoïste. Nous l’aimons pour cela. Quelques mots assemblés bizarrement ou d’une manière inhabituelle ouvrent des portes en nous qu’un discours brillant mais trop lucide laisserait fermées.
En repensant à ce Chawan brisé par notre shogun Kyotoïte, je revois la scène suivante. En rangeant une de nos belles assiettes dans le lave-vaisselle, mes doigts abimés par le traitement, qui me sauve la vie, l’ont laissé glisser sur deux autres petites. Et hop, trois assiettes cassées en une fois. Le lendemain, je ramène ma tasse à café vers le même endroit et paf, il m’échappe des doigts et s’explose au sol.
Je n’ai pas fait de Kintsugi avec. Si vous avez regardé les étapes à accomplir, vous aurez compris pourquoi. Quelque part je le regrette, mon historiette aurait eu une belle fin. Mais c’est pas grave puisque la lumière me traverse…
Jetez un œil sur ce blog sur le Kintsugi, à qui j’ai beaucoup emprunté pour cet article : https://esprit-kintsugi.com/





C’est chouette de te relire 👍J’espère que tout va pour le mieux pour toute la famille et Charlie bien sûr.
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Bonjour Photonanie,
ce sujet de Kintsugi m’intéresse énormément. Je crois que je vais tenter de m’y mettre.
Oui tout va bien ici, Charlie comprise.
J’espère qu’il en est de même pour toi.
Je t’embrasse.
Régis
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Plaisir de te revoir Régis
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Plaisir partagé Barbara.
Bises
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Bonjour Régis c’est vraiment un agréable moment passé en te lisant, bon tu casses, tu en connais la raison, moi, je casse mais simplement car je suis maladroite. J’espère que tout se passe au mieux pour toi. Nous ne sortons pas, il fait froid et le soleil ne fait que de timides apparitions. Mon mari a fait un ou une AIT il y a un mois et demi , opéré de la carotide , 21 jours d’hôpital et le voilà revenu affaibli mais là. Bisous et à bientôt le plaisir de te lire . MTH
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Bonjour Marie,
quelqu’en soit la raison, l’important c’est de casser. Histoire de bien réparer ensuite. 😂
Côté météo, c’est pareil ici. Il y avait un peu de blanc sur le pan de toit que j’aperçois depuis la fenêtre de la salle de bain, et le vert de mon jardin était quelque peu blanchi. Quand à la température, assez fraîche pour ne pas mettre un pied dehors.
Quand au soleil, nous sommes entrés dans la période où le soleil ne tape aucune partie de la maison. Il faudra attendre fin février pour que la colline accepte de nous le rendre.
C’est un AIT (un accident ischémique transitoire). 21 jours c’est bien long, mais il fallait sans doute cela pour que les médecins te le rendent en bon état. Il doit être bien content d’être rentré chez lui.
Profite de sa présence et prenez soin de vous deux.
Bisous à vous deux.
Régis
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Super article Régis !! J aime particulièrement cette idée qu on peut faire du plus beau avec du cassé y compris sur le plan symbolique ou figuré le kintsugi donc je vais essayer de me rappeler ! Et oui ça fait lgtp qu’on n’avait pas eu de tes nouvelles je t’ embrasse
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Bonjour Cécile,
merci beaucoup pour tes remarques.
Je me suis fait rare et ne suis pas certain de revenir vite, mais cette histoire de Kintsugi me plait vraiment beaucoup.
Et puis le Japon m’attire…
Je t’embrasse
Régis
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Magnifique article ! Oui, le kintsugi magnifie la fêlure et même la brisure. J’ai très envie de prendre un cours sur cet art. Une manière symbolique aussi de réparer les aléas de la vie qui nous déchirent parfois.
Merci de nous revenir avec cette belle lumière.
Tous mes vœux les plus chaleureux pour votre santé.
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Merci pour vos remarques Soizic.
Moi aussi je suis fortement tenté. Je vais me trouver un livre sur le sujet pour apprendre la technique originelle.
Il n’y a pas trop de méthode pour réparer l’humain, la vie s’en charge, si on veut bien la laisser faire. Enfin je crois. Cependant cela dépend de chacun de nous.
Merci pour vos vœux. Jusque-là, ça va. Mon cancer m’accompagne depuis 12 ans maintenant. Et en ce moment, il est sage….
Prenez soin de vous.
Régis
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Super intéressant, Régis !
(et puis content de te retrouver sur le blog).
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Merci pour ta remarque Jean-Louis.
Je ne sais pas si ce retour est durable ou pas. Nous le verrons bien.
Belle fin de journée.
Amicalement,
Régis
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Je ne connaissais pas, très intéressant
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Merci Christine.
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Euh…ceux qui fracassent tout à coups de matraque, sont-ils sensés recoller les morceaux en adoptant la technique du kintsugi? 😉
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Pas sûr du tout !! 😂 La complexité de la technique doit plutôt inciter à faire taire maladresse et violence…
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Non seulement la fêlure laisse passer la lumière mais l’objet brisé et restauré à la poudre d’or est plus beau que l’objet intact. L’image est belle et puissante pour qui cherche à vaincre la maladie. Elle t’a déjà inspiré le désir de revenir parmi nous et on s’en réjouit ! Danielle
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Tu a tout compris Danielle. J’adore tout ce qui est tradition et culture Japonaise.
Mon fils est en stage au Japon en ce moment. Il nous reviendra juste avant Noël. Il est aussi épris de Japon, mais il en apprend la langue et s’est donné les moyens d’aller voir de plus près ce qui s’y passe.
Quant à mon retour, rien de moins sûr. On verra bien si j’ai des trucs à raconter.
Bises,
Régis
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Les Japonais ont la grande sagesse de vivre dans la conscience qu’un grand tsunami emportera tout. Et de cultiver la beauté malgré tout. J’y pense à chaque plantation. Je te souhaite déjà un joyeux Noël en famille. J’imagine que ton fils aura bien des choses à raconter. Et que tu pourras nous en parler ! Amitiés, Danielle
P.S. En attendant, je ne me lasse de tes ciels !
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Le Japon, une culture fascinante, envoûtante mais une société difficile à vivre.
気 (き)をつけてね 😉 prenez soin de vous.
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あなたもソイシック
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Heureuse de te retrouver et de te relire, Régis.
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Merci Francine. À bientôt. Bises
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🤗
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Bon retour dans la blogosphère ! Ça fait plaisir de revoir ce profil familier ! Très intéressant article, j’avais déjà entendu parler de ce procédé poétique.
Bonne soirée
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Bonjour Pierre,
je me suis inscrit à un cours qui aura lieu en janvier. Je vous raconterai ça.
Régis
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Le kintsugi ou la beauté de la fêlure. Il nous enseigne que lorsque quelque chose qui a de la valeur se brise, plutôt que de chercher à cacher son imperfection ou sa fragilité, il est plus utile de le réparer avec quelque chose qui possède la fonction de l’or : force, amour, humour, un nouveau niveau de conscience…
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Cancer et résilience je pratique déjà. Faisant le chemin inverse je m’intéresse maintenant au Kintsugi. Je prends un premier cours en janvier.
J’ai l’impression de faire à l’envers, mais la vie est ainsi faite.
Belle journée,
Régis
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Je ne trouve pas que ce soit « à l’envers ». C’est bien d’avoir trouvé des cours.
Belle soirée Regis
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