En mars 2020, je reçois une demande de quelqu’un de la maison d’édition Librinova via mon blog Maux et Cris. Mathieu Mazza, chargé de relation Auteur chez Librinova, me demande si je suis intéressé par la lecture de « La nuit noire a volé les étoiles » de Pauline Henri. Il propose de m’envoyer la version numérique afin que je rédige, si je le souhaite, une chronique.
Je réponds positivement, mais classe le livre je ne sais plus où, l’oublie et me sent gêné lorsqu’il me relance gentiment. Sa ténacité a finalement eu raison de mon inorganisation, son dernier rappel tombant alors que j’arrivais à la fin de la lecture d’un trop long livre. Hier, je commence la lecture de « La nuit noire a volé les étoiles » de Pauline Henri. Sachez que je me suis relevé cette nuit pour le finir. C’est une phrase que l’on retrouve souvent sur les avis des lecteurs. Ce livre se refuse à être lâché une fois qu’on y est entré. C’est déjà un très bon point.
C’est un premier livre. Un petit livre (180 pages) qui raconte une tranche de vie, de son début où le décor de la vie « idéale » de Pauline est planté, jusqu’à la fin de cette tranche où la nouvelle vie de Pauline est pleinement vécue. Entre les deux, des symptômes qui font consulter, des visites chez des médecins de toute obédience, des passages à l’hôpital, des rebondissements. Des surprises, bonnes ou mauvaises. Jusqu’à la libération, qui ouvrira une nouvelle vie pour Pauline.
Il en est ainsi de la maladie. Tout ce que raconte Pauline, je le connais bien et puis vous assurer qu’elle ne l’a pas inventé. J’ai reconnu 90% des situations, des lieux, des échanges, des caractères du personnel. Oui, il existe du personnel super humain, drôle, souriant comme il existe des médecins qui tiennent souvent une distance entre le malade et eux. Il faut comprendre que leur rôle principal et de soigner nos maladies, et qu’ils ne peuvent pas trop se laisser glisser sur le côté humain, sous peine de perdre leur objectivité. Celui qui a le mieux raconté cela, à mon avis, c’est Philippe Lançon, dans son livre sublime « Le lambeau » (voir la chronique que j’en ai fait).
Pauline nous raconte le menu détail de ce qui lui arrive. Vous pourriez penser que cela va être ennuyeux. Détrompez-vous, pas du tout. Je me suis interrogé là-dessus. Je pense que si cela fonctionne, c’est parce que rien n’est gratuit, les choses présentées sont d’une logique implacable, elles sont vraies et, j’y reviendrai, Pauline écrit sans affectation avec un style concis et efficace.

Il est certain que mon expérience du monde médical en tant que malade du cancer depuis dix ans m’a immédiatement placé comme un frère d’armes de Pauline. Les cursus médicaux sont tous identiques, mais il n’y en a pas deux pareil. Parce que nous ne les vivons pas totalement de la même manière, parce qu’il n’y a que des cas différents, parce que si nous sommes tous des humains, toi et moi ne sommes pas des clones.
Pauline aime la voile, elle est passée par les Glénan. Moi aussi. Cette partie prend une belle place, ce que je comprends, et je l’envie d’en faire beaucoup plus que je n’en ai jamais fait. Le titre de son livre pourrait fort bien venir de la navigation nocturne où la navigation aux étoiles est compliquée si les nuages cachent le ciel. Certes, un peu moins maintenant avec les instruments modernes.
Il est vrai aussi que lorsqu’on vous annonce que vous hébergez un cancer, le ciel s’assombrit sévèrement et la navigation, qui consiste à prévoir, rappelez-vous « gouverner c’est prévoir », devient aléatoire. D’ailleurs la phrase complète est « Gouverner, c’est prévoir ; et ne rien prévoir, c’est courir à sa perte ». Elle est d’Émile de Girardin, journaliste et homme politique du 19ème. Siècle, pas arrondissement. Quoique…
Note : Émile de Girardin est l’un des inventeurs du roman-feuilleton. Clin d’oeil aux lecteurs qui suivent mon Dupin.
Sur un bateau, ne rien prévoir revient à laisser son bateau devenir le jouet de la mer, qui aime bien s’amuser avec les coquilles de noix. Avec quoi pilotons-nous un bateau ? Avec un gouvernail. Aujourd’hui c’est une barre, qui d’ailleurs n’en est plus une.
Bref, lorsque vous avez un cancer, vous ne gouvernez plus entièrement votre vie, rythmée par les examens réguliers, les analyses, les protocoles. A ce régime, on apprend à moins prévoir, à vivre au jour le jour. A profiter de ce que la vie vous offre au moment où elle l’offre. La vie est une urgence, ne pas la vivre comme cela, c’est gâcher. Pauline en parle très bien. Elle a d’ailleurs réorienté sa vie en fonction de ces principes ensuite.
Revenons à son style. Il est sobre. Les phrases sont concises, sans superflu. On sent presque sa respiration. J’aimerais beaucoup pouvoir échanger oralement avec elle afin de vérifier si son expression orale est proche de son écriture, si la respiration est la même. Cela procure une lecture aisée, rythmée, homogène.
Sachez que le pathos, qui pourrait être lourdingue, n’est pas trop présent. Pauline Henri décrit très bien les moments difficiles, les moments d’interrogations, les moments d’attente, l’importance d’être entourée pour ne pas affronter seul(e) une telle expérience, les moments de joie, de solidarité. Je pourrais vous donner des exemples, mais le mieux est encore de lire son livre.
« La nuit noire a volé les étoiles » est un gros coup de cœur.
Je remercie Mathieu Mazza de sa confiance, que j’espère ne pas avoir trahie, et de sa patience, un exemple du genre. Je m’excuse auprès de lui et auprès de Pauline Henri d’avoir autant tardé à lire ce beau livre. Et je leur souhaite à tous deux une belle réussite.
La nuit noire a volé les étoiles
Pauline Henri
2020
Librinova
Livre : 15€90 & PDF : 5€99
Pour commander : https://www.librinova.com/librairie/pauline-henri/la-nuit-noire-a-vole-les-etoiles

Bonne journée les ami(e)s

©️ Texte et photos (sauf Photo du livre – voir la légende) – Régis Vignon
As tu vue le film : Nos étoiles contraires
L’as tu aimé ?
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Non je ne l’ai pas vu. Tu me donnes envie…
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Merci pour ce partage de ton coup de cœur.
Bonne journée, Régis.
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🥺🥺🖤
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Un très beau titre en tout cas, et une non moins belle chronique. Sujet grave, et pourtant c’est la vie. La vie qui continue, envers et contre tout. La vie, l’espoir encore et toujours. En fait, on n »attend pas que la pluie passe, on apprend a danser sous la pluie…
Merci mon cher Emplumé. Pour tout. Y compris le café 😉 Et d’être surtout 😘❤🌹
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❤️❤️❤️ Sénèque Encore… J’ai eu, il y a bien longtemps, une petite amie allemande qui venait me voir pendant ses vacances. Je l’emmenai manger dans des restaurants de plein de pays différents. C’était notre manière de voyager sur place. Un jour, il tombait des cordes à la sortie d?un restaurant. Nous n’avions pas de parapluie. Nous avons chanté et dansé Singing in the rain en éclaboussant l’eau de la rigole. Nous rigolions justement…
Je suis très touché ma chère SOLène, juste là, là où les flèches ne font que du bien quand elles s’enfoncent. Merci jusqu’au bout des temps infinis. Tu m’es très chère. 🌹❤️😘
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Pfiou tu me touches profondément. A très bientôt mon Emplumé. Je reprends le boulot. En télétravail, mais quand même 😉
Gros bisous, a très vite. 😘❤🌹
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Je communique ce nom à ma bibliothécaire de ce pas, avant même de l’avoir lu, question de confiance 😉
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Oh ! Merci de ta confiance. J’espère que tu ne seras pas déçue.
Belle journée Photonanie. 😘
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Le choix d’un lecteur pour ce livre ne pouvait que se porter sur toi, qui est, d’une certaine façon, familier de ce parcours hospitalier. Tu nous donnes véritablement envie d’entrer dans ce récit. Merci pour ta fine et sensible analyse. Bonne après-midi, cher Régis.
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C’est vrai que je m’y suis senti chez moi. Merci Renée et belle journée,
Régis
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Belle chronique ! Quand un livre répond à notre expérience personnelle, il nous touche encore plus.
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