Maux & Cris

Textes, Poèmes, Livres, Rêves et autres billevesées

28/4/2020

Le petit billet est très touché et reconnaissant…

Vous avez été adorables. Vous n’avez pas idée de mon bonheur à lire vos inquiétudes, vos encouragements, votre compassion, vos manifestations d’amitiés, vos conseils, votre humour et tous vos mots. J’ignore comment vous dire le bien que cela m’a apporté. Comment dire que l’on se sent appartenir à une fratrie, une communauté extrêmement informelle constituée presque autant de personnes que je connais dans la vraie vie, que de personnes avec qui les liens ne sont encore que virtuels. Je n’ai jamais été déçu par celles et ceux qui sont passé(e)s d’un monde à l’autre.

Le fond de l’histoire ne serait-il pas simplement l’amitié. Le concept existe depuis longtemps, il a fait ses preuves. En ces temps de confinement, se développe-t-elle plus par le simple fait que l’on ne voit pas ses amis, peut-être même plus encore par le simple fait de savoir que l’on ne peut pas les voir. Il parait que l’humain désire plus que tout ce qu’il ne peut pas avoir.

Vous êtes fidèles à mes petits billets, pourtant inégaux, j’en suis bien conscient. Vous m’encouragez à continuer. Ce billet me procure la motivation pour écrire une feuille A4 par jour. C’est nouveau de m’assigner à cette production régulière, quelque chose après quoi je courrais depuis plusieurs années. Ce confinement me confine à écrire. Désolé, je ne pouvais pas l’éviter celle-là…

Je compte profiter de ce temps pour trouver les grandes lignes qui me permettront d’écrire quelque chose de plus long. Jusque-là, je n’ai pas gardé grand-chose des idées venues, mais bon, ce n’est pas fini. Serais-je trop strict ?

Une bonne nouvelle que je partage avec plaisir. Un de mes textes participe à un concours organisé par la médiathèque d’une ville de moyenne taille, dotée d’une politique culturelle plutôt ambitieuse. Alea jacta est !

Autre bonne nouvelle, dix de mes textes participent à un concours lancé par la maison d’édition qui va m’éditer pour la première fois (cf. les épisodes précédents). Il y a dedans un poème que nombre d’entre vous ne doivent pas connaître et que je posterai tout à l’heure. C’est un texte important pour moi, car fondateur. Vous verrez, c’est marqué dedans !!

Un petit volet médical pour finir de vous rassurer. Une fois le résultat de mon ECBU dans les mains, j’ai tenté de contacter mon médecin généraliste. En début de matinée, on a pris mon numéro de téléphone, avec la phrase peu engageante « on vous rappellera ». À 14h00, rien, je rappelle. A la quatrième fois j’ai l’assistante. Il faut prendre rendez-vous et il n’y a pas de place avant demain matin.

Je contacte donc mon oncologue à l’hôpital Foch. Elle me connait sous toutes les coutures depuis des années. Je lui dis ce qu’il y a sur le résultat d’analyse. « Je vous envoie l’ordonnance. Nous avons déjà échangé par mail ? ». Oui. Durée de l’appel téléphonique : trois minutes. Dans les cinq minutes j’avais mon ordonnance. Notez bien qu’elle ne me redemande pas mon courriel. Je vous épargnerai tout commentaire inutile.

Il y a deux heures environ, je regardai Arte concert, une émission consacrée à Rostropovitch. Il jouait la sarabande de la suite numéro deux de Bach. C’était d’une beauté fulgurante. L’image était curieuse, des années 1960 je crois. Le fond d’écran montrait les musiciens de l’orchestre dans l’attente de jouer. Il y avait la vie, si bien personnifiée par Rostropovitch, entourée par des têtes de morts. L’une était absente. Merde, tu joues avec Rostropovitch, et t’es pas là pour en profiter ! D’un autre visage ne sortait que des sentiments négatifs, envie, méchanceté, je ne sais quoi. Tous sentaient la mort ou, dans le meilleur des cas, le vide.

Je ne vous quitterai pas sur quelque chose de négatif. Cette journée et les précédentes sont pleines de la chaleur de vos témoignages d’amitiés. Mille fois merci.

Bonne journée les ami(e)s ! Je vous aime collectivement et individuellement !

 

29/4/2020

Le petit billet a envie de poéter…

Mes enfants ont hérité du goût de leurs parents pour la musique. Les deux ont évolué à leur manière sans que nous leur imposions quoi que ce soit. Ils ont développé l’immense majorité de leurs univers musicaux à leur façon. Les deux ont acquis une culture qui me laisse le cul par terre. Les deux font de la musique, Lola fait de la basse et du ukulélé, Paul de la batterie, un peu de piano. Les deux chantent sans se l’avouer. Les deux ont une oreille précise. Lola en deuxième année de prépa n’a plus le temps de toucher à l’instrument. Paul pratique sa batterie tous les jours.

Et c’est là que je veux en venir. Super connaisseur en métal, il ne joue que cela. Et quand les baguettes volent de tom en tom, écrasent les cymbales et que ses pieds bombardent la double pédale, même s’il n’en met pas à côté, il est aisé de constater que la maison n’est pas assez grande et sa chambre pas assez isolée pour avoir la moindre chance d’échapper à la pression acoustique.

J’ai essayé de le mettre au jazz, mais il a décidé que c’était hors de sa portée. Cela dit, pour m’y être frotté, je pense comme lui. Mais tout n’est pas perdu, il écoute un peu de jazz et les morceaux de métal qu’il affectionne le plus sont ceux avec des métriques complexes. Si en plus le morceau comporte plein de changement de métrique, genre celui où les musiciens s’amusent à mettre toutes les métriques possibles, il ne l’aime que plus. Je garde donc espoir.

Je m’excuse de vous parler de cela, en fait au départ c’était juste pour expliquer que je n’arrivais pas à me concentrer pour écrire ce fichu billet à cause du bruit… qui vient de s’arrêter d’ailleurs.

 

Pris de l’envie de poéter

Avant que survienne l’été

Ne pas être une baudruche

Je ricane sous ma capuche

 

Celui qui me verrait pigeon

Planqué au sein de l’ivraie

Poussera au fin fond de Dijon

D’horribles cris d’orfraies

 

Le poète se sent libre

A sa guise de jouir

Chaque mot polir

Devient caresse ou calibre

 

Va chier contrainte

Je piétine ton étreinte

Tu veux me confiner ?

Plutôt dans le Dauphiné

 

Certains mots parfois

Semblent de guingois

Leur vérité nous est donnée

Après des mois ou des années

 

Poéter au milieu de la mitraille est peine perdue.

Laisser l’esprit souffler et produire ses fruits,

À la fin d’une répétition ardue

Le mot vibrera du doux silence construit.

 

N’est-ce pas étrange que des vers au même nombre de pieds diffèrent autant par leur longueur ? D’ailleurs, s’ils en ont, pourquoi rampent-ils ? Certains verres ont un pied, mais ne savent pas marcher sans un bon coup de main. Comment appelle-t-on un vers à mille pieds ? Comment va Benjamin du même nom ?

Il est bien temps de vous laisser, ça fume là-haut ! Attendons de savoir si notre Région est notée verte ou rouge pour avoir idée de la liberté qui sera nôtre. Pour l’heure, et pour longtemps dans le cas des vieilles choses comme moi, restons confinés.

Belle journée ami(e) lect(eur)(rice) !

 

30/4/2020

Le petit billet s’interrogeait…

sur ce qu’il allait aborder quand une conversation sur un blog WordPress ami et une autre sur Facebook lui amène son sujet.

Un de mes contacts WordPress Lyonnais produit des articles en français et en anglais, langues et cultures qu’il manie parfaitement toutes deux. L’idée y est aussi bien tournée que la langue, et la photo qui accompagne, souvent en noir et blanc, est belle et signifiante. Dans l’une de ses dernières publications, il cite Camus « Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de la philosophie. ».

Un échange de commentaires s’ensuit. L’une propose « se dire que si la vie n’a pas de sens, peut-être que la mort en a un… ». Je lui réponds « Le seul sens à tout cela ne serait-il pas uniquement celui que l’on veut bien y mettre ! » et vous me reconnaitrez dans la suivante « vivons pleinement la vie afin qu’elle ait du sens. ». Pour finir, John, car c’est son prénom me cloue d’un superbe « En ce qui me concerne – et j’ai encore le désir de vivre au moins des années – , j’aime beaucoup cette phrase d’Emil Cioran qui poursuit un peu le vôtre à sa manière :  » Si la mort n’avait que des côtés négatifs, mourir serait un acte impraticable. » ».

Cioran, connu pour son côté pessimiste, sceptique et désillusionné, a fini obsédé par l’idée du suicide avant de terminer dans les bras décharnés mais goulus d’Alzheimer. Un ami m’avait confié aimer lire le philosophe bien évidemment pour la richesse et l’originalité de la pensée, mais aussi plus sournoisement pour la sensation jubilatoire de bonheur qu’il ressentait comparativement en prenant conscience de sa capacité à ne pas être aussi désespérément affligé.

Plus tard dans la journée, ce fut un post de mon amie Evelyne qui faisait écho à l’article de John. Dans le cadre de ces défis sous forme de chaîne Facebook, que j’exècre et refuse systématiquement sauf à de rares ami(e)s, Evelyne poste la couverture de l’Etranger de Camus, un livre qu’elle conseille de relire de temps à autres. Je l’ai justement relu récemment et avait fait cette courte note :

« L’histoire est celle d’un homme étranger à sa vie et son destin. Un personnage distant avec les autres, non impliqué dans ses actes, qui cherche de vraies raisons de faire des choses, et comme il n’en trouve pas, il se laisse ballotter par les rencontres. Il est plus observateur de sa vie qu’acteur, ce qui causera d’ailleurs sa perte. Ce qui est remarquable c’est, à mon goût, l’écriture de Camus. Simple, efficace, limpide. C’est son premier « vrai » roman, les ouvrages précédents sont des essais.
Heureux d’avoir relu ce livre. J’étais passé à côté de la première lecture il y a longtemps. »

Encore une interrogation sur le sens de l’existence. Peut-on vivre en restant simple spectateur de sa propre vie ? La réponse de Camus est que ne pas réellement vivre sa vie nous mène plus vite à la mort. Du coup, autant faire en sorte qu’elle soit agréable, utile et passionnante. Ne pas se résigner, combattre. Mes ami(e)s Jacques et Elisabeth m’ont dit « Courage et Rage » lorsque j’étais récemment sur le flanc.

Voilà mes ami(e)s, j’espère ne pas avoir plombé l’ambiance, ce n’était pas le but. Essayons juste de ne pas perdre sa vie à n’en rien faire sous le fallacieux prétexte qu’à la fin on meurt. De toute façon nous en connaissons l’incontournable finitude. Alors, faisons de notre vie un enchantement. Evidemment, sans confinement, et surtout sans ce covid-19 de mes deux, ce serait bien plus aisé. Rassurons-nous, ces deux boulets ne dureront pas toute la vie, comme on dit…

Je vous embrasse fort.

 

1/5/2020

Le petit billet voyage en Absurdie…

L’Absurdie est une contrée que certains pensent imaginaire. C’est absurde ! La raison en serait exclue pour d’obscures raisons que chacun chercherait désespérément s’il n’était pas pourvu de bon sens. Exclu aussi le bon sens ! C’est logique me direz-vous ! Mais la logique n’a pas droit de citer dans cette cité. Un tel pays est impossible, mon cher Régis tu pédales dans la semoule, ou dans la choucroute. Croyez-vous ?

La dernière fois que j’y fus, je venais de passer le col de la Palette et descendait à vive allure le long d’une belle saucisse lorsque je vis le château d’Absurdie, entouré par ses belles tours. De belles tours de mégardes, fortement mégardées, du genre de celles que l’on ne peut pas prendre par mégarde. Il faut sacrément monter dans les tours pour y pénétrer. La réception d’un document pourrait d’ailleurs faire monter un certain nombre de personnes dans les tours…

Nos ami(e)s professeurs, enseignants ont reçu 63 pages de protocole pour savoir comment appliquer le déconfinement dans leur classe. Le document a plus de pages que le calendrier n’a de jours ouvrés pour aller jusqu’aux vacances. C’est Courtelinesque, disponible sur internet, vous y avez tous accès, il recense ce qu’il faut faire dans différentes situations, par exemple une fiche accueil des élèves, fiche aménagement des classes… Globalement, c’est plutôt bien organisé.

La langue est compréhensible et ne fait pas d’emprunt à cette débilité de jargon farcie d’ellipses dont l’objectif serait de ne plus froisser personne. Ici un crayon ne s’appellera pas un « outil scripteur » et une gomme ne se cachera pas derrière un « bloc mucilagineux à effet soustractif ». Nous sommes en terrain connu. Il faut zoomer plus avant pour pénétrer en Absurdie.

Chaque consigne prise séparément semble logique et raisonnable. Par exemple, pour la récréation, lire la consigne suivante ne choque pas « Neutraliser l’utilisation des jeux et installations d’extérieurs avec points de contact (par balisage physique, rubalise, …) ou assurer une désinfection régulière adaptée. ». Evidemment, on choisira d’interdire l’accès plutôt que de devoir se désinfecter l’entièreté de l’installation à chaque récréation. On vous laisse choisir, enfin, en apparence.

Un autre exemple : « Faire sortir et rentrer les élèves en respectant la distanciation physique entre chacun des élèves (une matérialisation pourra être envisagée). ». Extrêmement logique à première vue. Maintenant imaginez les escaliers desservant des couloirs plutôt étroits où les portes de classe se suivent. Et vous comprenez vite que la chose va être compliquée sauf à décaler toutes les classes afin qu’elles ne se « frôlent » pas. Et c’est effectivement le discours entendu à la radio ou à la télévision. Mais ce n’est pas écrit dans le protocole.

L’effort est reporté sur les enseignants. A eux de se débrouiller avec les parents d’élèves, avec les ramassages scolaires…

Tiens, parlons du ramassage scolaire. Les bus emmenant mon fils à son lycée sont pris d’assaut. Il faudrait qu’il n’y ait qu’un élève là où il y en a habituellement deux ou quatre. Pense-t-on que les sociétés de bus puissent affréter deux fois plus de bus ? Est-il imaginable qu’elles doublent leurs nombres de chauffeurs de bus en si peu de temps ? Et s’ils ne le font pas, comment font les élèves ?

Le sujet est confié aux Régions dont aucun président n’est LREM puisque ce parti n’existait pas encore. C’est l’histoire de la patate chaude. Le bon sens me chuchote que l’enseignement à distance, s’il n’est pas parfait, fonctionne. Les inquiétudes concerneraient les décrocheurs, dont on pense qu’ils reviendraient à l’école si cette dernière reprenait. En sommes-nous certains ? Selon ce que me remontent mes enfants, rien n’est moins sûr.

Il était si simple de dire que l’école ne reprendrait qu’à la rentrée de septembre. Le débat était clos, les élèves continuaient en télé-enseignement. Nous allons assister à des droits de retrait, des villes qui vont dire non, d’autre oui. Une joyeuse cacophonie bien française va s’élever et les tensions vont s’accumuler alors que nous devrions être unis pour combattre covid-19.

Bienvenue en Absurdie ! Le pays où les édiles naviguent dans des couches bien loin des nôtres. Le pays où les citoyens vont encore payer et repayer pour remettre l’économie à flot. Le pays où la transition écologique va être glissée sous le tapis malgré tous les discours lénifiants que l’on nous servira. Le pays où la révolte reprendra de plus en plus forte, de plus en plus raide.

Abasourdi en Absurdie, je voudrais me pincer et me réveiller dans la voiture de Oui-Oui. Dans un monde imaginaire réinventé et géré par des gens sensés…

Bonne journée mes ami(e)s.

 

2/5/2020

Le petit billet observe…

Nous avons de très gros escargots que l’on voit de temps à autres traverser le terrain. Il faut être très attentif pour les observer vu leur vitesse de déplacement qui frôle les quatre mètres par heure. Parfois il faut même plisser les yeux et ne laisser une mince fente ouverte pour les apercevoir. Tout est hors norme chez eux, de vraies bêtes de concours. Leur coït dure entre huit à douze heures, précédé par des préliminaires de deux heures.

Informé de cette scène torride par Sylvie, qui avait repéré leur manège, je comptais sortir mon Pentax pour faire quelques shoots. Mais je me suis dispersé et lorsque je décidais enfin de m’y atteler, le temps que l’idée me monte au cerveau, les douze heures étaient écoulées et chacun était reparti de son côté, des arcs-en-ciel plein les yeux. Moi qui me réjouissais de produire ma première sextape, je loupe bêtement l’opportunité offerte. La prochaine fois je serai plus respectueux du temps qui passe.

Hier matin nous étions deux à nous croire samedi. Nous commençons à perdre nos repères temporels. C’est ce qu’on lit dans les ouvrages où le personnage est en prison. Au bout d’un moment, il perd toute notion du temps qui passe. Ce confinement pèse lourd, de plus en plus lourd. Nos envies de sorties se font de plus en plus pressantes, mais nous sommes dans un département rouge, elles ne seront donc pas bientôt satisfaites.

Une part de nous s’habitue à ce faux rythme. Certains nous assènent que nous devrions nous habituer à cette situation, car la libération est encore loin. Faisant partie d’une population doublement à risque, par mon âge (plus de soixante-cinq ans) et par mon affection longue durée, j’ai l’impression de supporter pas trop mal ce faux rythme, mais une part de moi se rebelle. Cela me fait plaisir de savoir que toute révolte ne m’a pas abandonné, que l’envie est encore là. Qu’il y a encore des projets à définir, des tâches à accomplir, des combats à mener. Hors de question de baisser les bras.

Personne doublement à risque enfermé dans un double confinement c’est lourd, de plus en plus lourd, mais paradoxalement, je me sens de plus en plus léger. Et je le dois à vous, qui me rendez tant de gentillesse, de compliments et d’amitié en retour et à ce billet que je dois alimenter parce qu’engagé dans un concours, mais surtout pour valider à mes yeux une certaine capacité à « produire » quotidiennement.

J’aurais voulu vous dire que j’avais revu nos amis à hélice. L’un a disparu. Cela arrive souvent, ces petits voisins sont de nature discrète. Ils réapparaissent de temps à autres. L’autre a été vu, planqué sous des feuilles, histoire de n’être pas offensé par le soleil. Je vais tenter de les croiser avec Pentax.

J’allais vous dire bon dimanche ! Décidément… je crois avoir avoir rêvé d’assister à une messe, ce doit être cela…

Bonne journée les ami(e)s !

 

3/5/2020

Le petit billet se sent amical…

On est enfermé avec nos très proches. C’est un fait. Dans certains cas de figures c’est l’ouverture du drame. Les tensions sourdent, les situations s’électrisent. Les mots qu’ils ne faut pas dire sont lâchés, explosent à la figure, quand ce ne sont pas les coups. Le drame est alors consommé. Des effets indésirables du mésamour, de l’indifférence, des frustrations…

Pour ma part et l’immense majorité des vôtres, nous avons la chance d’être épargnés et je pense très fortement à celles et ceux qui ne le sont pas. Comme vous sans doute, j’en connais.

On peut donc se sentir heureux. Mais pas si vite, notre réseau familiale et amical nous manque. La virtualité ne remplace pas la poignée de main, ni la bise sonore, la tape sur l’épaule, l’éclat de l’œil, le petit plissement du coin de l’œil, le son de la voix, les tics, la manière de se déplacer, celle de tremper son carré de chocolat dans sa tasse de café, la mauvaise utilisation d’un mot, l’éclat d’un rire,…

Ces petits riens qui font un humain, le caractérise sont nos madeleines. Un ensemble de marqueurs patiemment collectionnés au fil du temps. Chacun d’entre eux est un petit bonheur, ensemble ils font un personnage et symbolisent le manque que l’on ressent lors d’une longue absence.

Parfois, lorsqu’on rencontre quelqu’un pour la première fois, notre collection de marqueurs existe déjà, sans que l’on n’ait jamais eu l’occasion de la constituer. Cela vous est surement déjà arrivé et donne lieu à des phrases du type « c’est curieux , j’ai l’impression de te /vous connaître depuis toujours ». Ces amitiés sont particulières, qui font d’un inconnu l’égal d’un vieil ami. C’est troublant.

Il y a les amis que l’on perd, ceux que l’on gagne. Des amis vos sur-sollicitent et puis, d’un coup et l’on n’en saura jamais la raison, disparaissent, comme par l’effet d’une mauvaise magie. Nous devions correspondre à quelque chose pour eux, mais un changement de critère, une prise de conscience, un je ne sais quoi, fait tout basculer. Une petite phase d’incompréhension est vite suivie d’un oubli féroce.

Et les amitiés amoureuses, ne sont-ce pas quelque chose d’étrange ? Vivre sur le fil du rasoir. On sait très bien le danger à basculer, du coup on se garde de dire le mot, de faire le geste de trop, celui qui casserait le délicat équilibre. Il subsiste toujours dans cette amitié un goût explosif d’inachevé. Si l’on franchit le pas c’est le début d’un amour saccageur ou la fin d’une amitié frustrante.

Que nous connaissions nos amis depuis peu ou depuis des dizaines d’années, cela ne change rien à l’affaire. Le manque est là, plus ou moins pénible, et sa force augmente avec le temps. Cultivez vos marqueurs et vos amitiés mes ami(e)s. C’est si précieux. Sans nos amis, que nous resterait-il, que serions-nous ? Nous ne survivrions pas à la première pelletée de terre…

Bonne journée !

 

4/5/2020

Le petit billet longe le ruisseau…

Il chemine sur le sentier. À côté, le petit ruisseau laisse flotter dans l’air une petite musique légèrement mouillée, par moment assourdie par une touffe moussue. D’un côté, la pente boisée s’élève dans une semi-pénombre. Plus haut, le sous-bois sent la mousse et le champignon. Après la forte pluie tombée tout à l’heure, quelques îlots de lumière transpercent les arbres pour venir illuminer le sol.

De l’autre côté un pacage déploie sa grasse verdure sur quelques centaines de mètres. L’herbe d’un vert presqu’acide y est touffue. Quelques vaches noires et blanches se régalent. On entend les grosses langues arracher les touffes d’un geste simple, affirmé, maintes fois répété, et juste après, la clarine accompagne la bête un peu plus loin.

Pas d’autre bruit que le ruisseau, les vaches qui paissent et celui de ses pas. De temps à autres, un oiseau fait un trille. Un autre lui répond depuis l’autre versant. Des battements d’ailes s’échappent d’un buisson. Plus loin, un chien aboie. Une voix lui crie dessus,  mots lointains mâchés par la distance. Finalement le chien se tait.  Le calme retombe doucement sur la vallée.

Il arrive à son endroit préféré. Un amas de pierre bloque le passage du ruisseau. Un étang s’est ainsi constitué, avec ses grenouilles, quelques couleuvres et parfois une salamandre qui passe par là. C’est là qu’il posera son sac, s’assiéra sur une pierre, sortira son reflex. Il procédera à quelques réglages, fera quelques photos pour vérifier si ses réglages fonctionnent.

Ensuite, c’est l’attente…. Parfois récompensée. Quelques clichés en sont le témoin. Reptiles, beaucoup de grenouilles, quelques oiseaux, des jeux de lumière dans l’eau, mais pas encore cette salamandre jaune et noire qui manque à son palmarès. Il a lu que la salamandre ne vit pas dans l’eau, ne s’y sentant pas à l’aise, mais elle en a besoin pour se reproduire. Il faut donc se trouver là après une grosse pluie pour optimiser les chances de l’apercevoir.

Ces moments sont bénis. Loin des sollicitations d’un monde trop nerveux, son esprit s’apaise ici. Il laisse les idées apparaître, se développer et disparaître. Il devient simple observateur de ces mouvements involontaires. Certains appelleraient cela de la méditation. Lui ne l’appelle pas, il s’en fout. Il attend juste ce pourquoi il est là.

Parfois, il amène une bouteille de blanc, qu’il laisse fraîchir dans l’eau. Avec une bonne tranche de pain, un pot de rillettes ou un bout de fromage et un Opinel, ça fait bien l’histoire. Là, il n’a rien amené. Pas besoin. Il est fasciné par cette salamandre qu’il compte observer et photographier pour compléter sa galerie.

Il se réjouit d’avance des moments de post production. Découvrir ses photos en grand, jeter les clichés inexploitables, sélectionner les meilleurs, essayer les derniers filtres récupérés sur Internet, mais surtout jouer avec toutes les possibilités du logiciel. Pas fan de Photoshop, trop complexe à ses yeux, il préfère Lightroom plus accessible.

Bonne journée les ami(e)s !

 

5 réflexions sur “Billet double confinement – semaine 7

  1. Quelques remarques sur ton récapitulatif de billets « du temps du confinement ».
    ROSTRO, j’ai eu la chance de l’entendre plusieurs fois en concert, plus comme chef d’orchestre que comme violoncelliste, d’ailleurs. À l’un de ces concerts (Orchestre de Paris, à Pleyel), un des instrumentistes s’est ÉVANOUI pendant le concert ! Évidemment, pause, évacuation de l’évanoui, et reprise du concert, à l’entracte, on a eu une annonce, l’instrumentiste s’était remis, tout allait bien !
    Ceci dit, j’ai d’autres souvenirs, beaucoup plus désagréables, d’instrumentistes pendant les répétitions, voire pendant les concerts, lors des productions professionnelles où j’ai eu la chance (oui, je sais, je suis très chanceux) d’être en tant que choriste.
    Pour ton Voyage en Absurdie, je me permets de signaler une bande dessinée extrêmement poétique de GREG et DANY, dont le titre d’un des albums est le grand Voyage en Absurdie. (Cette BD se passe au pays de Rêverose, de l’autre côté du miroir que le Vrai-Monde-Où-l’on-S’ennuie. Dit comme ça, ça peut faire peur, mais ce n’est pas du tout gnan-gnan, c’est juste du rêve).
    Pour les autres articles, je ne commente pas. C’est toujours ton style que j’apprécie tant, et je m’en voudrais de déposer mes mots sur les tiens !
    Bonne soirée, Régis.

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    1. Maux&Cris dit :

      Bonsoir Jean-Louis,
      quelle chance d’avoir pu assister à des prestations de tels géants ! Les miens naviguaient dans les eaux du jazz. La frontière est mince à de tels niveaux d’exigence. Cependant, certains géants d’un côté se sont révélés être bien maladroits lorsqu’ils ont tenté de passer la ligne. Parfois c’est un vrai naufrage…
      Merci pour nous faire connaître le grand voyage en Absurdie. Cela devrait me plaire.
      Dépose tes mots, Jean-Louis, si tu le souhaite. J’ai plaisir à te lire.
      Bonne soirée.

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  2. Comme tu dis, à ce niveau, la frontière est mince ! Et j’imagine que tu as aussi des souvenirs extra ordinaires (au sens premier du terme) de concerts de jazz avec des « pointures ».

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    1. Maux&Cris dit :

      Oui, Ahmad Jamal que j’ai vu plusieurs fois, Ray Charles… J’ai vu énormément de groupes rock et jazzrock dans les années 70 et 80 lorsque j’étais Lyonnais. Presque tout ce qui passait..
      Sur Paris, plutôt des petites formations jazz. En Europe, nous avons de merveilleux musiciens, des compositeurs qui écrivent pour tout type de formation. Le souci c’est que maintenant je suis à 70 km de Paris, que ma santé limite mes déplacements et que je rate plein de choses à cause de cela.
      Mais vivement que les concerts repartent….

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  3. Vivement que les concerts repartent, oui !
    J’ai vu/entendu Keith Jarret en concert (à Pleyel aussi), mais comme les frontières sont minces, je n’arrive pas à le classer (ce qui me va très bien, parce que je n’aime pas trop les classements pré-définis, et les étiquettes que l’on pose qui font qu’une fois qu’on a une étiquette, on n’a plus le droit de changer ! Or, comme je l’ai très souvent dit lors des formations que j’ai eu l’occasion d’animer, les seuls organismes qui ne changent pas sont les organismes morts !)
    Bonne soirée, Régis.

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